
175 ans d'Histoire et d'héritage
Les navires de CSL pendant la Seconde Guerre mondiale
Les navires de CSL ayant servi pendant la Seconde Guerre mondiale
Par John Henry
Peu après l’entrée en guerre du Canada en 1939, de nombreux navires-cargos de CSL ont délaissé leurs parcours habituels sur les Grands Lacs et le Saint-Laurent pour entreprendre des missions cruciales de transport sur des eaux infestées de sous-marins dans des zones tantôt aussi lointaines que les Îles britanniques et l’Amérique du Sud et tantôt aussi familières que le Golfe du Saint-Laurent, où des submersibles allemands (U-boots) ont coulé plus de 20 navires alliés.
L’entreprise a malheureusement perdu des navires dans chacune de ces trois zones par suite d’attaques ennemies.

La contribution de CSL à l’effort de guerre
CSL a contribué 15 navires-cargos à l’effort de guerre maritime, soit environ le quart de sa flotte. Tous les navires devaient être de petite taille – chacun ne mesurant qu’environ 75 mètres de long (250 pieds) – car ils devaient circuler sur de petits canaux qui précédaient ceux de la Voie maritime du Saint-Laurent. Ces « navires de canal » étaient tout juste plus grands que les sous-marins qui les prenaient pour cibles, note Fraser M. McKee dans son ouvrage Sink All the Shipping There, qui rend compte des pertes de navires marchands canadiens durant la guerre.
La plupart des navires de canal de CSL réquisitionnés durant le conflit ont servi dans les eaux côtières britanniques, où ils remplaçaient de grands navires affectés à de plus longs trajets. (Quatre des navires de l’entreprise basés au Royaume-Uni ont transporté des fournitures lors du débarquement de Normandie en 1944 qui visait à libérer la France et l’Europe.) Cependant, à des milliers de kilomètres de là, au moins trois navires de CSL ont exécuté une mission très différente, mais non moins cruciale.
Ces navires transportaient de la bauxite des mines du nord-est de l’Amérique du Sud vers un centre de transbordement en mer des Caraïbes. Ils avaient un tirant d’eau suffisamment faible et une longueur assez limitée pour circuler sur les rivières sinueuses du Suriname et de la Guyane britannique (aujourd’hui la Guyane) en vue de prendre en charge la bauxite utilisée pour fabriquer de l’aluminium pour les avions de guerre.
Une fois les navires arrivés au centre de transbordement, situé pour la majeure partie de la guerre sur l’île de Trinidad, la bauxite était chargée sur des navires de haute mer pour être acheminée en Amérique du Nord. Le minerai était finalement livré à une aluminerie comme celle d’Arvida dans la région de Saguenay au Québec.
Durant cette périlleuse mission de transport de bauxite, deux navires de CSL ont été coulés par des sous-marins allemands, soit autant que ceux détruits par l’ennemi au large des côtes britanniques et irlandaises.
CSL a également subi une lourde perte lors du premier conflit naval en eaux canadiennes depuis la guerre de 1812, la méconnue « bataille du Saint-Laurent », qui s’est déroulée sur deux voies navigables d’importance capitale, le bas du fleuve Saint-Laurent et le golfe du Saint-Laurent. Comme le rappelle la Revue militaire canadienne, les sous-marins allemands y ont torpillé 21 navires marchands et cinq navires de guerre entre les années 1942 et 1944.
Victimes de guerre
Juillet 1940
Le Magog a été le premier navire de CSL victime de la guerre. Il a été bombardé, puis torpillé dans l’Atlantique à environ 97 km au large de l’Irlande par un U-99 le 5 juillet 1940, alors qu’il transportait du bois entre Halifax et le nord-est de l’Angleterre. Après avoir mis à la mer un canot de sauvetage et un radeau depuis le navire en perdition, les membres d’équipage ont reçu la visite du capitaine du sous-marin qui, après avoir vérifié qu’il n’y avait pas de blessés, a eu l’attention de leur donner une bouteille de brandy. Les 23 membres d’équipage ont par la suite été secourus par un navire qui les a transportés vers un port en Irlande.

À peine cinq jours plus tard, CSL a perdu le Waterloo, bombardé et coulé par un avion Luftwaffe au large de la côte Est de l’Angleterre; fait rare, c’est un aéronef allemand et non un sous-marin ou un navire de guerre de surface qui l’a détruit. Bien que le Waterloo ait été équipé d’un canon de 12 livres de calibre 3 pouces, il a été impossible d’en faire usage en raison de l’altitude de l’avion, comme l’a relaté le capitaine du navire, qui a estimé à six le nombre de bombes ayant touché le navire. Les 20 membres d’équipage ont néanmoins pu atteindre la rive sans heurt dans des canots de sauvetage.

Février 1942
CSL a perdu un autre navire en février 1942, quand un U-129 a torpillé et coulé le Lennox dans les Caraïbes où le navire transportait de la bauxite. « Au bout de quelques minutes, le navire a commencé à se briser en deux; 11 membres d’équipage ont fui à la hâte en canot de sauvetage et sept autres ont sauté à la mer », écrit Fraser Mckee dans Sink All the Shipping There. Deux autres membres d’équipage ont péri. Un pétrolier a recueilli les survivants et les a transportés en Guyane britannique, d’où ils ont regagné le Canada.

SEPTEMBre 1942
Puis, en septembre 1942, la tragédie a frappé le Donald Stewart de CSL alors qu’il s’approchait du détroit de Belle Isle, à l’extrémité Est du golfe du Saint-Laurent. Sur son pont se trouvaient des centaines de fûts de carburant d’aviation destinés à un aérodrome de Goose Bay (Labrador), qui servait de base aux avions affectés à la couverture aérienne des convois de l’Atlantique. Une seule torpille tirée par un U-517 a touché le navire et transformé les fûts de carburant en brasier infernal. Bien que les flammes aient dévoré en grande partie le Stewart, qui a sombré en quelque sept minutes, seulement trois des 20 membres d’équipage ont péri, ce qui tient du miracle. Les autres ont réussi à fuir en canots et en radeaux, puis ont été recueillis par un navire de guerre canadien.

Plus tard ce même mois, le Norfolk est devenu le cinquième et dernier navire de CSL victime de la guerre. Sa perte a été particulièrement douloureuse. Le 18 septembre, le navire transportait de la bauxite dans les Caraïbes lorsqu’il a été touché par deux torpilles tirées par un U-175 au large des côtes de la Guyane britannique. Les fortes explosions ainsi déclenchées ont tué six personnes à bord, dont le capitaine. Le navire aurait sombré en une minute, de sorte que les 13 survivants n’ont eu d’autre choix que de sauter par-dessus bord. Un navire-cargo les a recueillis et les a transportés à Trinidad.


Reconnaissance spéciale
Quatre des dix navires de CSL encore en état de marche à la fin de la guerre en 1945, le Anticosti, le Granby, le Knowlton et le Oxford, méritent une mention spéciale pour leur service lors du débarquement de Normandie, reconnu comme l’un des plus francs succès des Alliés en Europe. Aucun de ces dix navires n’a repris du service au sein de la flotte de la CSL.
Survivants
- Anticosti
- Dundas
- Granby
- Kindersley
- Knowlton
- Lanark
- Mapleton
- Oxford
- Sherbrooke
- Winona
Victimes
- Magog
- Waterloo
- Lennox
- Donald Stewart
- Norforlk